Vivants sous terre
Le numéro que la revue Communications consacre à ceux, humains et non-humains, qui vivent sous terre, prend Alice, l’héroïne de Lewis Carroll pour guide et s’attache au moment inaugural où, à la poursuite du Lapin Blanc, elle s’engouffre innocemment dans un large terrier. Si ce tunnel se révèle, in fine, la porte d’entrée d’un rêve, il conduit cependant Alice à expérimenter le jeu, avec le langage autant qu’avec le corps, au cours de ses rencontres successives avec les « mirabilia » de l’underground, étrangement « vivants » dans ces lieux hostiles.
Dans le sillage des expérimentations d’Alice, les auteurs de ce numéro s’orientent dans ces lieux inédits en faisant description des manières de vivre, de faire, et d’acquérir un sens du souterrain, pour le mineur, le scaphandrier, le combattant ou la personne qui trouve abri dans les sous-sols d’une métropole. Ils montrent comment l’on fait pour y entrer, y travailler, y habiter. Comment certains savoirs y prennent racines et comment s’inventent gestes techniques et espaces à vivre dans les interstices du sol. Comment, dans cette matière si particulière, constituée d’une profusion d’organismes vivants, des apparentements subtils se créent, des relations s’agencent, qu’il faut cartographier, dans ces bordures redéployées entre l’inerte et le vivant.